31 CLASSIQUE (s)

Avec ces trois cycles de mélodies, Britten puise son inspiration dans des sommets de la poésie européenne pour mieux repousser les limites du genre. Démultipliant les rapports voix-instruments, il passe des cordes seules (Les Illuminations) à un ensemble de cordes avec vents, harpe et timbales (Nocturne), sans oublier le fascinant dialogue avec le cor dans Sérénade. Tout un univers révélé ici par des interprètes aux moyens superlatifs !

Karlheinz Stockhausen (1928 - 2007), pionnier de la musique électroacoustique et du son spacialisé, nous présente lui-même la genèse de son oeuvre, Mantra : "J'étais assis à côté du chauffeur, et j'ai laissé libre cours à mon imagination... Je fredonnais pour moi-même... J'ai entendu cette mélodie et tout s'est enchaîné très vite : j'ai eu l'idée d'une seule figure ou formule musicale qui allait se déployer sur une très longue période de temps... " Créée en 1970, la pièce est composée pour un ensemble de deux pianos, wood-block, cymbales antiques et pour un modulateur en anneau reproduit aujourd'hui par des sons électroniques synthétiques. Mantra est une oeuvre emblématique de son époque, moment fondateur de l'explosion psychédélique des années 70.

Ce troisième volume du Quatuor Doric consacré à Haydn est porté par le succès des précédents que l'ensemble a défendu sur les plus grandes scènes, notamment le Carnegie Hall à New york et le Royal Concertgebouw d'Amsterdam. Le Quatuor met sa virtuosité, son énergie rythmique et sa tendresse poétique au service de ce corpus incroyable, l'opus 64, les Quatuors N°1 à 6. Une musique ouverte et très diverse, constamment en mouvement vers l'imprévisible, une caractéristique du maître Haydn.

Jeff Mills, DJ, Producteur visionnaire, précurseur et pilier de la Techno de Detroit, signe "When Time Splits", un nouveau projet et collaboration avec le pianiste Mikhaïl Rudy... Ce nouvel album voit Mills s'écarter de son genre habituel pour créer un album de musique classique, mais toujours aussi visionnaire et précurseur...

« Puisque "un ciel si sombre ne s'éclaircit pas sans orage" (Shakespeare), l'on sait gré à Amandine Beyer et ses Incogniti de le faire éclater. S'y dévoile le recueil Musikalische Ergötzung (Plaisir musical) qui comprend six suites pour deux violons (avec usage de la scordatura) et basse continue. Polyglotte des sons, Pachelbel y cultive à sa manière "les goûts réunis" de notre Couperin, en mélangeant les styles français, italien et allemand. Pour cadencer le tout, des airs profanes, dont Orage d'avril, où s'invitent accents rustiques et célébrations diverses, attestent de son influence sur la génération suivante à laquelle appartient Johann Sebastian Bach. La fermeté des idées, soutenue par une grande richesse contrapuntique, n'empêche pas ces mouvements de danses de s'avancer avec leur luxe d'ornements si bien restitué par la violoniste. [...] La prise de son, superlative, donne à entendre la cohésion des pupitres, notamment à travers l'enlacement des deux violons et les commentaires fondus de l'orgue.» (Classica, avril 2016 / Jérémie Bigorie)

Galice, seconde moitié du 13e siècle. Pour son deuxième enregistrement publié par Arcana, VivaBiancaLuna Biffi nous propose un remarquable programme centré sur les sept Cantigas de Amigo de Martin Codax, l'un des premiers cas dans la musique monodique où le locuteur est une femme. Dans ce véritable cycle de chansons, la protagoniste parle aux vagues de la mer, à la fois obstacle et messagère, pour lui demander son amant. Chantant à la viole, VivaBiancaLuna Biffi donne voix aux sentiments humains, tandis que dans les interludes, Pierre Hamon, de ses incomparables flûtes médiévales, transforme les vagues en sons, en émotions et en mots au-delà des mots.

On retrouve sur cet album de Noël les arrangements des Piano Guys sur des classiques intemporels tels que Silent night, The little drummer boy ou encore O holy night / Ave Maria en featuring avec Lexi Walker. Des invités de marque se produisent en outre sur l'album comme Placido Domingo, David Archuleta, Peter Hollens et le Mormon Tabernacle Choir.

German Brass nous présente un enregistrement avec des chansons de Noël du monde entier. Il nous montre comment les cuivres transmettent harmonieusement la joie et l'atmosphère de la saison : les trompettes festives étincellent, le son doux des cors insuffle de la chaleur à la musique, les percussions ajoutent des éléments ludiques. Une expérience d'écoute joyeuse et réfléchie. Cet album comprend des mélodies internationales populaires telles que Joy to the world, O come all ye Faithful, des favoris américains tels que Have yourself a merry little Christmas ou Rudolph the red noseed Reindeer ainsi que les rares belles chansons ukrainiennes : Nebo yasni zirky vkryly et Shchedryk. D'autres points forts sont les arrangements de trois chorals de l'Oratorium de Noël de Bach qui capturent merveilleusement l'ambiance festive de Noël.

La musique de chambre se porte bien dans notre pays. Si de nombreux quatuors se sont formés depuis une vingtaine d'années, c'est maintenant le trio avec piano qui fleurit, un ensemble plus rarement constitué comme tel. Le Trio Atanassof, repéré par l'excellent label indépendant allemand Hänssler, a choisi pour ce disque de réunir deux oeuvres tchèques. Ecrit sous le coup de la mort de sa fille aînée, le Trio en sol mineur de Smetana n'a pas de programme précis mais l'on y sent bien le chagrin d'un père et l'alternance de l'ombre à la lumière qui semble raconter un drame intérieur, d'ailleurs magnifiquement narré par les Atanassof. Quant au Troisième Trio en fa mineur de Dvorak, c'est une oeuvre de fougue et de révolte dans laquelle le compositeur affirme son tempérament tchèque, s'opposant ainsi ouvertement à ses amis bien intentionnés (Brahms en tête) qui attendaient de lui des oeuvres plus cosmopolites. Le Trio Atanassov donne une interprétation à la fois complètement investie et débordante de vitalité de ces deux oeuvres fortes.

Pourtant tout à fait contemporains, Claude Debussy (1862-1918) et Albéric Magnard (1865-1914) n'ont que très peu de points communs. Ils ont cependant celui d'avoir écrit chacun un unique quatuor à cordes (respectivement en 1893 et en 1903, et tous deux créés par des formations belges). Ce point commun est loin d'être anecdotique. En effet, nombre de compositeurs français de toute cette période charnière ont entretenu avec le quatuor à cordes un rapport tel qu'ils en sont arrivés à ce même résultat : écrire "leur" quatuor à cordes. Pour comprendre cet état d'esprit, nous devons revenir en arrière. On a coutume de considérer que le véritable père du quatuor à cordes est Joseph Haydn (1732-1809). Si ses premiers essais relèvent du divertissement, très rapidement il en fixe la forme, et hisse le genre à un niveau de perfection inédit jusque-là ; sauf exceptions, cette forme en quatre mouvements sera très durablement respectée, jusqu'à Debussy et Magnard compris. Ses premières oeuvres avec ce format datent de 1769, et en l'espace de trois ans, il compose les trois séries de six quatuors à cordes des opus 9, 17 et 20, en pleine naissance du mouvement artistique dit Sturm und drang ("Tempête et passion"), précurseur du romantisme.

Après son intégrale des concertos de Prokofiev, Vadym Kholodenko retrouve son compositeur de prédilection. Les pièces rassemblées ici incarnent ce qu'était Prokofiev : un mélodiste hors pair, tendre, classique et romantique, dont la profonde sincérité lui confère un statut à part, à côté des compositeurs qui se prétendaient d'avant-garde et des hérauts du réalisme soviétique. Cette liberté propre au compositeur retrouve toute sa vitalité dans le jeu subtil et jamais démonstratif de l'interprète ukrainien.

C'est en écoutant Vladimir Horowitz jouer Schumann dans les années 1980 à Paris que Jean-Efflam Bavouzet découvre la Grande Sonate. Guidé par les conseils avisés de son aîné, il livre une interprétation qui combine des éléments de la version originale et révisée - vingt ans plus tard - de la sonate. En couplage, Bavouzet accompagne cette sonate d'oeuvres de jeunesse de Schumann et du célèbre Gesänge der Frühe ; pièce qui sonne le glas de la vie du compositeur tourmenté.